À flanc de falaise se dresse l'Arête du Ciel, forteresse des souverains de Ravenhole depuis des millénaires. Taillé à même le roc se profile la silhouette d'un argonaute de pierre représentant le Roi-corbeau, fondateur de la citadelle. Si sa tête couronnée semble soutenir les fondations du palais, son torse est gravé à même le roc, encastré dans les parois rocheuses comme le sont ses jambes. Au cœur de l'Argonaute s'étirent une succession de canaux, de tunnels, de meurtrières et de postes de garde qui assurent à la forteresse sa réputation d'imprenable. L'ascension à cheval peut prendre une demie heure alors que l'ascension à pieds peut durer plus d'une heure... Autant dire que les souverains qui règnent sur les falaises d'Okerkysten sont ceux qui regardent le monde de haut...

Tout aussi rocheuse que ses parois, la forteresse a été presque entièrement taillée à même les falaises, de ses fondations à son mobilier. Dans la salle d'Aquilon (qu'on surnomme également la Salle des courants d'air) se trouve le trône argenté des souverains de Ravenhole, comme arraché de la pierre et finement sculpté de bas-reliefs légendaires, un trône impressionnant dont le dossier fait plus de deux mètres de haut, jetant une ombre menaçante sur les sujets qui osent exposer leurs doléances au monarque. En face du trône se déploie une série d'arches de pierre qui offrent une vue imprenable sur le royaume et flanquent un balcon d'une taille monumentale. On raconte que de nombreux ennemis de Ravenhole furent défenestrés, nourrissant les corbeaux en contrebas comme autant de corps déchirés sur les versants tranchants des falaises. Constamment parcourue de courants d'air, la salle n'est à l'abri de l'hiver que grâce aux lourdes tentures et panneaux de verre qu'on hisse grâce à un impressionnant système de poulies devant les ouvertures béantes qui servent de fenêtres.

Le vent, le froid, le claquement du feu dans la brise violente. Malgré le climat méridional qui règne à Ravenhole, tous s'entendent sur le fait que l'Arête du Ciel est un palais venteux et glacial. Pour cette raison, toutes les chambres, toutes les suites et les appartements sont dotés de cheminées imposantes où brûlent des feux en permanence. Taillés dans le roc, les meubles conservent peu la chaleur. Pour les domestiques et les esclaves, cela constitue souvent un arrêt de mort et plusieurs s’enrhument, gagnés par des fièvres fréquentes dues au froid perpétuel. Pour les plus favorisés, les pièces sont abondamment chauffées, des carreaux offrent une barrière contre le vent et les lits sont couverts de matelas de plumes, de fourrures raffinées et d'étoffes luxueuses.

Orientée vers le versant sud-ouest du palais, la Salle du Suroît accueille les séances du Conseil royal. Dominée par une table colossale faite de pierre ouvragée et finement travaillée flanquée de chaises imposantes coussinées de damas violacé, des vingtaines de candélabres y jettent une lumière diffuse et enveloppante secondés par les fenêtres en arche qui agrémentent la paroi sud de la salle. Les Conseillers s'y réunissent deux à trois fois par semaine, avec ou sans le concours du souverain, et s'y décident les affaires importantes de l'administration du royaume.

Balustrade faisant le tour du palais, elle est criblée de fenêtres en arche et offre une vue imprenable sur le royaume en entier. On la surnomme Galerie des Hurlements, puisque le vent s'y engouffre sans barrière, sifflant son hurlement strident aux oreilles de ceux qui s'y aventurent par temps venteux. L'été, la galerie est agréable, offrant un refuge inégalé contre la chaleur et l'humidité qui règne dans le château. Le printemps, les dalles y sont perpétuellement suintantes et glissantes. L'automne, la galerie est glaciale et l'hiver, elle est létale, que ce soit à cause de la glace qui menace de vous pousser dans le vide ou à cause du froid qui vous gèle les os.

Étrange surnom pour l'aile des geôles que celui d'Aile du Corbeau. On raconte que cette section du château a gagné son nom à cause de l'homme impitoyable qui sert de bourreau, un homme à la peau noire et au costume de deuil qui torture les prisonniers avec une cruauté inimaginable qu'on s'est plu à surnommer le Corbeau. Ici, les prisonniers les plus récalcitrants sont suspendus par les poignets à plus de cent mètres du sol à travers des trappes dans le plancher. S'ils sont condamnés à mort, on coupe simplement la corde. Sinon, on leur sert une leçon en les laissant dans cette position durant toute une journée ou toute une nuit, à la merci du vent rageur et du vertige.